Concentration en CH4 constante autour des années 2000

L’augmentation de la concentration en méthane (CH4) dans l’atmosphère est ralentie depuis 20 ans. Cette concentration semble même pratiquement stable depuis 1999. Oui mais pourquoi ?

Résumé d'un article paru dans Nature : Contribution of anthropogenic and natural sources to atmospheric methane variability, Bousquet P. et al, Nature 443, 439 - 443 (28 Sep 2006)

Le méthane (formule chimique CH4) est le composant principal du gaz naturel, il est inodore et très inflammable. C’est un fort gaz à effet de serre : sur 100 ans, le méthane a un pouvoir radiatif réchauffant 23 fois plus important que le CO2 (cf ref 1). Toutefois comme il est en moindre quantité (concentration atmosphérique globale moyenne de 1770 ppbv = 1,77 ppmv) dans l’atmosphère que le CO2 (concentration atmosphérique globale moyenne de 380 ppm) il ne contribue que pour 20% au forçage radiatif global des gaz à effet de serre à durée de vie longue (la contribution du CO2 est elle de 60%).

La concentration de méthane a augmenté de 150% depuis 1750 mais depuis 1985, cette augmentation ralentit voire se stabilise. Les principales sources de méthane (ref 2) peuvent être classées en deux catégories :

Sources naturelles :

- Zones inondées (rizières, marais ...) : ~ 225 millions de Tonnes/an
- Océans : ~ 20 millions de Tonnes/an
- autres ... (contributions moindres)

Sources anthropiques :

- Industrie (production de gaz naturel et fuites associées) : ~ 110 millions de Tonnes/an
- Ruminants : ~ 110 millions de Tonnes/an
- Décharges : ~ 40 millions de Tonnes/an
- Feux (forêts et autres) : ~ 40 millions de Tonnes/an
- Traitement des déchets (incinération) : ~ 25 millions de Tonnes/an

Le principal puits à CH4 est le radical OH contenu dans l’atmosphère, qui, en réagissant chimiquement avec le méthane, contribue à 90% de sa disparition. OH est un agent oxydant des principaux polluants de l’atmosphère (CH4, CO, NOx, composés organiques) qui provient de la dissociation photochimique de l'ozone (O3) et de l'eau.

L’article de Bousquet et al. attribue la part de variabilité observée dans les concentrations atmosphériques de CH4 aux différentes sources de méthane.

 

Variations du taux de croissance du méthane atmosphérique

 

 

La Figure 1 montre la variation en (ppb/an) de la concentration atmosphérique de méthane depuis l’année 1985 jusqu’en 2004. La courbe en noir correspond à la moyenne globale des stations couvrant le globe. Les courbes de couleurs, à des moyennes faites sur les stations appartenant à une bande de latitude donnée.

On peut noter les variations qui existent d’une année sur l’autre mais surtout une tendance générale à un ralentissement du taux d’augmentation de la concentration sur la période considérée (1985 à 2004).

L’article paru dans Nature explique :

1) les facteurs contrôlant les variations inter-annuelles de la concentration atmosphérique de CH4 : variations au niveau du puits chimique dans l’atmosphère (oxydation par le radical OH), au niveau des émissions ? Si ce sont les émissions qui varient, lesquelles contribuent le plus aux variations ?

2) Qu’elle est l’origine de la tendance au ralentissement de l’augmentation des concentrations de méthane sur ces derniers 20 ans.

La figure 2 montre sur cette même période les anomalies (i.e. flux moyen sur 20 ans soustrait) de flux de méthane associées au zones inondées ( en haut et en bleu), aux feux de biomasse (au centre et en vert) et aux flux anthropiques (industrie et ruminants, en bas et en marron). Les zones de couleurs donnent une mesure de l’incertitude, liée aux paramètres du modèle, permettant d’obtenir les flux à partir des concentrations atmosphériques.

 

Variations des émissions de méthane par inversion atmosphérique, bilan par processus



Cette figure montre :

1) que c’est la variabilité des flux liés aux zones inondées qui contribuent le plus à la variabilité interanuelle sauf lors de forts El niňo (comme en 1997-98), où c’est alors la composante liée au feux qui y contribue le plus (lors d’évènements El niňo, les sécheresses engendrées augmentent le nombre de feux).

2) La tendance global au ralentissement du taux de croissance est associée à une diminution des émissions anthropiques (industrie + ruminant). Cependant, à la fin de la période considérée (de 1999 à 2004), les émissions anthropiques ont tendance à augmenter. Mais cette augmentation est compensée par la diminution des zones inondées (plus de sécheresses). Ceci explique les faibles taux de croissance observés au niveau des concentration atmosphériques depuis 1999 (cf figure 1).

 

Réferences

(1) IPCC Third Assessment Report
(2) Houweling (1999) in Climate Change 2001. United Nations Environment Programme.